J’avais déjà compris il y a 6 ans lorsqu’on « m’a accouché » de mon premier enfant que quelque chose n’allait pas dans notre façon de mettre les bébés au monde. Que le froid milieu hospitalier n’était pas le meilleur endroit pour ça.
Je ne présageais rien de l’avenir et de mon expérience de mère. Je n’avais pas de solution pour changer tout ça. Tout ce que je savais, c’est que je ne voulais plus jamais revivre un accouchement comme celui-là !!!
Je me souviens même en avoir parlé au « grand et renommé » obstétricien haptothérapeute qui m’avait découpé, délivré puis recousu, vêtu de son plus beau tablier de boucher
. Je me souviens lui avoir dit mon mécontentement face à cet accouchement volé. Je crois qu’il n’a dû rien entendre de ce que je lui disais ou bien peut-être était-ce la première fois qu’on lui parlait ainsi et que c’est pour cela qu’il n’a rien su répondre.
Et puis le temps a passé. Le lien qui dès le premier instant avec ma fille avait été rompu, entre autre à cause de l’interventionnisme médical, a mis un certain temps à se construire et je m’en culpabilisais.
Tandis que la situation s’apaisait, je me décidais enfin à vouloir un deuxième enfant.
C’est alors que tout à fait par hasard (mais le hasard fait parfois bien les choses !!), j’ai lu le livre de Leboyer « Pour une naissance sans violence » et ses mots mon parus d’une telle évidence !
Il n’était alors plus question pour moi de mettre un autre enfant au monde sans réunir certains paramètres qui me paraissaient fondamentaux : Je voulais une faible luminosité pour accueillir bébé, le moins de bruit possible, pas de bain immédiat, pas d’aspiration, ni mesure, ni collyre, ni pesée, ni piqûre, ni vitamine ou autres substances.
Je voulais que le cordon ombilical de mon enfant soit coupé seulement lorsqu’il cesserait de battre pour permettre à la circulation sanguine et à la respiration de se mettre en place de façon autonome, à son rythme, sans être brusquée.
Je ne voulais pas que mon tout-petit soit privé du contact physique rassurant de sa mère. J’exigeais qu’on respecte mon enfant dans cette épreuve si difficile qu’est la naissance, afin qu’il puisse la vivre avec le moins d’agression possible.
Aujourd’hui, grâce à des moyens chimiques entre autre, on pallie à la douleur de la mère mais qu’en est-il de celle de l’enfant qui naît ?
Permettre à mon bébé de s’éveiller à ce monde en douceur, sans violence au creux de moi. Voilà ce que je désirais par-dessus tout. Je voulais le bien-être de mon enfant avant le mien.
Lorsque j’ai su que j’étais enceinte, je n’avais pas encore envisagé l’aad, je n’y avait même pas pensé il me semble. C’est après mon premier rendez-vous avec le « gygy-obs » de l’hôpital où je devais accoucher que l’aad m’est apparue comme une évidence.
Ce médecin qui n’avait pas une minute à lui, froid, glacial, presque inhumain et qui vous traite comme un numéro, comment pouvait-il respecter mon bébé lorsqu’il viendrait au monde alors qu’il ne me respectait déjà pas ? Tout ça m’a glacé le sang.
Alors, j’ai pris mon annuaire téléphonique et j’ai appelé toutes les sages-femmes de mon département jusqu’à en trouver une qui pratiquait l’accouchement à domicile. OUF !!!
Et puis nous avons cheminé ensemble, la sage-femme et moi, petit à petit.
Au départ, elle m’a simplement écouté lui expliquer ma vision de la naissance, ce que je souhaitais pour mon bébé et pour moi, que si je me tournais vers elle c’était simplement parce que je savais que mes désirs étaient strictement incompatibles avec le milieu hospitalier et ses protocoles médicaux.
Elle a donc accepté de s’occuper de moi, tant sur le plan physique que psychique car je n’étais pas seulement un utérus « habité », j’étais aussi une foule de sentiments divers et variés, une montagne de sensibilité, une tête pleine de questionnement, une femme à rassurer et à encourager tout simplement.
Rassurer, parlons-en ! J’ai hésité presque jusqu’au dernier instant à vivre l’aad et cela malgré toute la confiance que je portais en ma sage-femme. J’étais un peu apaisé de savoir que l’hôpital n’était qu’à 10 minutes de chez moi et que si je flanchais, la sage-femme m’y suivrait. J’appréhendais l’imprévisible urgence ingérable à la maison. En fait, je l’ai appréhendé jusqu’au bout, jusqu’à l’instant ou bébé était là et que je savais que tout allait bien.
Le chemin vers l’aad peut être jalonné de questions, de doutes étrangement mêlés à une immense détermination. Paradoxalement, c’est ainsi que je me sentais, extrêmement décidée mais pleine de doutes.
Peut-être était-ce parce que j’étais confrontée à l’incompréhension et aux jugements d’une société formatée et hermétique qui considère l’accouchement comme une pathologie.
Que répondre à la toute jeune pharmacienne nullipare qui lorsqu’en voyant votre ordonnance de matériel nécessaire à l’accouchement vous dit : « et en plus c’est à vous de fournir ça, la sage-femme ne fournie pas tout ? ».
Rien, on ne répond rien.
Que répondre à l’anesthésiste de l’hôpital lorsqu’il vous dit comme s’il parlait à une gamine irresponsable: « avez-vous bien mesuré les dangers que représentent un aad ? ». Posément, avec maturité, on répond «
oui tout à fait, au revoir monsieur ».
Que répondre à la secrétaire de PMI qui vous « menace » de faire venir la sage-femme de secteur chez vous pour vérifier, parce que c’est obligatoire « dans ce genre de cas », alors que vous veniez seulement chercher un carnet de santé vierge pour votre bibou. On répond : «
ok, je la recevrais sans problème s’il le faut, qu’elle vienne mais je n’ai pas besoin d’elle, on s’occupe déjà très bien de moi ! » (elle n’est jamais venue hihihi !!!).
Que répondre au généraliste, à qui vous faites l’honneur de demander qu’il vienne à votre domicile faire l’examen médical obligatoire du nouveau-né et qui vous rétorque qu’il ne préfère pas prendre cette responsabilité. La responsabilité de cautionner un acte qu’il croit irresponsable !! On répond : «
bien monsieur le docteur, au revoir monsieur le docteur et à jamais ».
Nombre de fois j’aurais pu mentir concernant mes projets d’accouchement mais je m’y refusé car mentir c’était comme avoir honte hors je n’avais aucune honte, j’étais au contraire fière de moi et j’assumais mes choix.
Finalement, je n’ai pas souffert de tous ces jugements, ils faisaient partis du chemin qui me mènerait à la victoire. J’ai remarqué que la vie est ainsi faite, qu’elle fait souvent en sorte de vous mettre des bâtons dans les roues, qu’il faut se battre pour obtenir ce que l’on souhaite, certainement pour que la victoire soit encore plus savoureuse.
Et elle a était tellement savoureuse.
J’ai réussi à mener ma grossesse sans encombre, jusqu’à un terme compatible avec l’aad. Et le le jour J est arrivé.
J’ai accouché en un éclair. Deux heures de réelles souffrances ont suffit pour voir naître Mathieu et permettre à l’amour de jaillir encore plus et nous éclabousser tous ; moi, mon mari (qui a était « fort »midable), ma fille, mon fils et BA, sans qui cette explosion de bonheur n’aurait jamais pu naître.